Val de Nauze

Ils ne sont pas immortels.

 

 

Vous savez, certainement, que nos académiciens sont immortels. Ils ne sont que 40 et, à ma connaissance, bien peu concourent lors des élections municipales.

 

Celles-ci auront lieu les 23 et 30 mars.

 

Un sévère recul de la démocratie populaire. Les candidatures seront dûment déposées à l'autorité préfectorale dans  quelques jours, au plus tard le 6 mars à 18 heures, et, dans l'hypothèse d'un second tour, le 25 mars.

Jusque là il y a peu d'originalité si ce n'est que dans les communes les plus modestes les candidats serontobligés de faire enregistrer leur intention de solliciter les suffrages. Dans le passé, dans la ruralité profonde, les électeurs avaient toute latitude pour voter pour n'importe quel citoyen éligible dans leur commune, candidat ou non.

 

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Georges Bonnet, au passé trouble, il vota les pleins pouvoirs du maréchal ce qui ne fit pas son collègue Yvon Delbos, prit place au conseil municipal de Brantôme sans avoir été officiellement candidat.

 

Si cette permissivité citoyenne disparaît force est de reconnaître que bien peu de citoyens ont été proclamés élus sans avoir fait acte de candidature. On notera, néanmoins, que sous la IVème République Georges Bonnet, après une période, pour le moins, bien trouble, réapparut à Brantôme sans avoir, officiellement, concouru pour son élection. Il existe bien d'autres cas mais, somme toute, ils ont relevé de l'exception et, en général, relevaient d'absence totale ou partielle de candidat(s).

 

Le loup ert l'agneau.jpg

 

 "Qui te rends si hardi de troubler mon breuvage ?

Dit cet animal plein de rage :

Tu seras châtié de ta témérité."

Lafontaine "Le loup et l'agneau".

 

 

À mon humble sens cette  latitude citoyenne, rangée dans les poubelles de l'histoire, constitue une restriction du législateur qui n'entend pas que le commun des mortels puisse venir troubler la quiétude de l'appareil. "On" admet de moins en moins l'intrusion citoyenne, legs ancestraux des fondements républicains, qui ont permis à un ouvrier serrurier de devenir maire de Strasbourg, en 1924, même si l'histoire nous a révélé qu'il a bien mal fini, ou à un modeste douanier de ceindre l'écharpe tricolore au gland d'or de la deuxième ville de France, en 1946. C'est tout simplement franchement inadmissible, insupportable et intolérable.

"On" s'achemine donc vers un professionnalisme. Il se situe aux antipodes de l'expression démocratique et républicaine, il instaure la mainmise des leviers et le verrouillage des circuits, par le gros million de personnes des appareils et du système, et il impose, par ses règles, à l'écrasante majorité de se contenter de la satisfaction de valider sans bruissement ni murmure.  

 

Le législateur a donc voulu formater le paysage pour les élections municipales.

 

Partons des plus modestes. Notre Hexagone doit compter 3.400 communes de moins de cent habitants et 10 000 de moins de 200 habitants. Dans ces communes il faudra, comme à Paris, avoir fait acte de candidature avec, comme souplesse, la faculté de se présenter individuellement. Pour l'immense majorité de ces communes de moins de 200 habitants la liste unique sera la règle de fait. On peut estimer qu'il y aura, dans ces entités, entre 140 000 et 150 000 candidats dont environ 107 000 élus.

Entre le 6 et le 28 mars, a fortiori le 4 avril, ces deux dates étant les dates d'élection des maires, sauf miracle puissance x, il y aura quelques décès.

Si l'on considère que le nombre de décès de cette frange de population est comparable à la norme cela pourrait déboucher sur un nombre non négligeable de conseils qui vont se trouver en situation d'impossibilité d'élire leur maire car ils ne seront plus au complet avant même d'avoir commencé leur mandature.

Les ardents défenseurs de ce nouveau système objecteront que ce n'est pas nouveau et qu'avant il y avait, aussi, des décès de dernière minute qui justifiaient une élection partielle dés le départ ; certes… Ce qu'il y a de nouveau c'est qu'avant les électeurs, ayant la latitude de voter pour qui ils voulaient, corrigeaient ces cas extrêmes ; seuls subsistaient les cas ultimes où un élu décédait entre le jour de son élection et le jour de l'élection du maire. On notera, qu'au second tour, par défaut, un seul suffrage peut ouvrir, dans des cas extrêmes, le champ de l'élection et éviter le blocage.

 

Paul Chastellain.jpg

 

Mon ami Paul Chastellain, personnage issu de la populaire Résistance ariégeoisemaire de Tarbes, décéda, dans son bureau, en 1983, pendant le dépouillement immanent à la réélection de la liste progressiste qu'il conduisait.

 

Franchissons le cap des  communes les moins peuplées.  Environ 28 % des communes ont moins de 200 habitants et, plus de la moitié d'entre elles, selon toute vraisemblance, votera pour une liste unique. En partant de la même logique démographique on va probablement connaître des dizaines de cas où l'on va être amené à procéder à une élection partielle pour compléter les conseils municipaux.

 

Un peu plus haut. Les communes qui se trouvent dans l'amplitude de 500 à 999, elles, sont celles où la problématique devrait être rare, voire rarissime, car seules seraient incomplètes celles où une liste unique aurait obtenu tous les sièges et où l'un d'entre ceux qui la composent disparaîtrait avant le 28 mars.

 

Autre effet pervers. Dans les communes de 1000 habitants et plus, elles sont, aussi, plusieurs milliers, beaucoup d'entre elles connaîtront le régime de la liste unique ; surtout à cause de la règle de la parité. La totalité des candidats de celles-ci sera proclamée élue. Dans ces cas là il n'y aura plus aucune réserve, toujours en aval du 6 mars et en amont du 28 mars, là où un candidat décéderait. Dans ces communes les électeurs pouvaient, par la latitude de la permissivité totale du vote, rétablir la totalité de l'architecture municipale jusqu'à la dernière minute.

 

D'aucuns diront que ce schéma porte une sinistrose fataliste. Chaque jour en France plusieurs milliers de nos concitoyens nous quittent. La population des candidats aux élections est peut être un peu moins vulnérable que l'échantillon nationalcela reste tout de même à démontrer, mais il paraît quasi certain que ces nouvelles règles vont, ça et là, poser problème.  

 

Pierre Fabre.

 

 

 

 


 

* Imaginons une commune de 99 habitants.

 

L'ancien système.

 

Au premier tour aucun candidat. Divers suffrages se répartissent sans qu'aucun citoyen n'obtienne la majorité absolue avec le minimum de 25 % des inscrits. Ballottage général.

 

Au second tour ; toujours pas de candidat. Les 99 habitants obtiennent chacun un suffrage. Les neuf citoyens les plus âgés sont proclamés élus et sont appelés, sous la présidence du doyen d'âge, à élire le maire.

 

  

Nouveau système.

 

S'il n'y a pas sept candidats il y a blocage.

 

S'il y a sept candidats, nouveau nombre de sièges pour ces communes là, et que ces sept candidats, individuels ou issus de liste(s), obtiennent 100 % des suffrages mais, malencontreusement, un élu décède entre le 7 et le jour de l'élection les six survivants ne peuvent élire l'un des leurs maire. Il faudra procéder à une élection partielle pour compléter le conseil municipal et pouvoir composer la municipalité.  

 



24/01/2014
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