Val de Nauze

Une mission mal connue ; celle de correspondant de presse.

 


 

Il faut, tout d'abord, bien que soit une évidence, dire que les correspondants de presse ne sont pas, comme certains le disent, voire parfois par erreur ou par commodité, le laissent entendre, des journalistes.

Journaliste est un métier. Ces personnages,  couverts par la  Convention collective nationale de travail des journalistes, dits du quatrième pouvoir, allusion aux trois pouvoirs constitutionnels, législatif, exécutif et judicairenous savons tous que dans notre démocratie il y a séparation des pouvoirsla démonstration est permanente, exercent une profession. Cette profession n'est pas sans risques physiques. Ceux qui couvrent l'actualité mondiale dans des pays instables sont naturellement plus exposés que ceux qui traitent l'actualité dans un quotidien de nos provinces.

 

Dans les pays qui promeuvent la liberté de la presse, aucun diplôme n'est, théoriquement, exigé pour exercer la profession de journaliste. Un stage dans un ou plusieurs médias peut toutefois être requis.

En France, la Commission de la Carte des journalistes, organisme indépendant, constitué de différents membres de la profession élus par leurs pairs, a autorité pour délivrer la carte officielle de journaliste, renouvelable chaque année, à tous ceux qui peuvent justifier de l'exercice plein et régulier de cette profession (c'est-à-dire de lui consacrer plus de 50 % de ses activités dans l'année). Une année probatoire est nécessaire avant de solliciter l'attribution de la carte.

 

 

 

 Notre ami Kléber Ferret, professeur honoraire, est, depuis des décennies, le correspondant local bénévole de L'Écho Dordogne, jadis l'Écho du Centre. Ce titre fut le plus marqué par la gauche de transformation sociale de sa région. Kléber, faut-il le préciser, n'a jamais reçu le moindre centime pour son travail de correspondant.

 

Le correspondant local de presseCLP dans le jargon journalistique, lui n'est pas un journaliste même si, parfois, localement, il peut y avoir un(e) journaliste professionnel(le) qui "cumule" les deux activités.

En France, "l’activité de correspondant local de presse est exercée à titre accessoire par rapport à une autre activité professionnelle", selon l'Urssaf. Elle est régie par la loi n° 87-39 du 27 janvier 1987, complétée le 27 janvier 1993.

En pratique, le correspondant local de presse a le statut de travailleur indépendant. Son activité est classée dans les activités professionnelles dites libérales, non réglementées. Il n'appartient donc pas à la même catégorie que le notaire, l'avocat, le géomètre-expert ou le médecin, mais son statut est comparable à celui de l'archéologue, de la cartomancienne ou de l'œnologue.

Jadis un peu n'importe qui était correspondant de presse ; parmi eux l'instituteur, le photographe (très prisé) ou le secrétaire de mairie. Ces personnages ont un peu évolué et les rédactions départementales demandent, aujourd'hui, aux postulants de répondre, si possible, à certains critères dont le premier est d'être informatisé.

 

Le profil idéal. Si vous êtes jeune ou, tout au moins, parfaitement valide, ouvert à tous les sujets, cela va du sport  au folklore en passant par la vie citoyenne, la connaissance de l'environnement, des chantiers, des personnages clé de votre bassin de vie, élus, ou animateurs de la vie associative, de l'activité culturelle, voire, dans certains cas, cultuelles vous avez quelques points de référence pour être regardé favorablement. Ce n'est pas tout il ne faut pas faire de l'ombre au lectorat par exemple si vous avez une passion pour le football au pays du rugby il vaut mieux savoir composer. Plus encore si vous êtes proche d'une sensibilité politique qui n'a pas beaucoup d'écho dans le lectorat du journal concerné il vaut mieux, si vous voulez vous y faire "une place", mettre la pédale douce. Un militant de L.C.R a priori, a bien peu de chance, d'être la plume locale q'un quotidien alsacien dans une ville hyper-conservatrice de cette Alsace. Les recruteurs de CLP de journaux d'information, ce n'est pas le cas pour les rares journaux d'opinion qui subsistent,  préfèrent que leurs relais ne soient pas identifiés à un courant de pensée.

 

Un paramètre primordial la qualité rédactionnelle. Il est demandé, bien sûr, d'avoir quelques aptitudes rédactionnelles. Cela veut dire, au premier degré, écrire correctement mais, plus encore, maîtriser l'analyse et la synthèse. Il ne s'agit pas d'avoir une plume balzacienne qui a besoin de trois pages pour dire qu'une branche cassée a obturé un sentier. Les journaux de province ont une problématique constante ; la place dans leurs colonnes. Il est demandé aux CLP d'être, autant que faire se peut, éclectique et concis pour tout ce qui est la vie quotidienne. C'est, bien sûr, frustrant pour les organisateurs d'une manifestation qui a demandé plusieurs mois de préparation de voir leur journée reléguée à quelques lignes assortie d'une petite photo. On entend alors échapper quelques jolis noms d'oiseaux illustrant le CLP disant "s'il s'agissait de parler d'un tel ou d'une telle, de telle commune ou de telle association il, ou elle, en aurait fait bien davantage".

Autre critère de recevabilité au club ; la disponibilité. Le CLP  parfait doit être disponible quasiment 24 heures sur 24 et être remarqué dans toutes les manifestations et cérémonies. Il convient qu'il soit là, en pleine nuit, si une cuve d'hydrocarbure brûle, le vendredi soir si le conseil municipal aborde un sujet important, le dimanche, le matin si les jeunes du rugby, sont reçus à la mairie, l'après midi si la fête médiévale bat son plein.

 

 

 


Notre amie Anne Bécheau, globe-trotter, historienne, conférencière, passionnée par les vieilles pierres et pas seulement par celles de Bézenac, est aussi écrivain public. Elle cumule ses activités avec celles de correspondante de presse. Elle écrit pour le pays cypriote dans Sud Ouest et L'Essor sarladais.

Cumularde, certes, Anne l'est mais le cumul de ses prérogatives est loin, bien loin, très loin, au niveau lucratif, d'équivaloir au cumul, de la députation, du conseil général et d'une modeste mairie. Anne atteint péniblement la cote d'un Smicard. Photo Titia Carisey-Jasik.

 

  

Que gagnent les CLP. Pour certains c'est un appoint non négligeable. Un correspondant d'un journal d'information bien implanté peut gagner 5 à 600 €  par mois s'il travaille beaucoup, s'il occupe le terrain à tous les temps forts. Il n'en est pas du tout de même pour les correspondants de journaux pauvres, voire très pauvres, qui ont plus que du mal à pouvoir rémunérer leur personnel permanent. Les correspondants de ces journaux ne perçoivent pas d'honoraire et n'ont aucune indemnité de déplacement. Ils n'ont même pas un repas convivial offert par an. S'ils veulent recevoir le journal, ils doivent, comme tous les lecteurs, en acquitter l'abonnement.  

 

Qu'attend le lectorat. Les lecteurs de la presse de province n'attendent pas du tout la même information que ceux de la presse nationale. En fouillant plus loin on peut constater que les lecteurs du Progrès, s'ils sont lyonnais, attendent des informations différentes de ceux de la commune rurale Vaux-en-Beaujolais, qui immortalise Clochemerle. Dans l'édition d'une grande ville de province la mise en place du proviseur d'un important lycée peut ne pas être relatée tandis que les mouvements de professeurs des écoles, en zone rurale, sont souvent mis en avant.

 

En faisant un peu d'humour déplacé on entend souvent dire "je prends le journal pour savoir qui est mort". Il est certain que le carnet, décès, mariages, naissances,  est plus regardé, par un lecteur du Périgord, que la rubrique de la bourse et qu'un article relatant le mariage, en grande pompe, de la fille du maire avec un industriel sud-coréen a plus de probabilité d'être remarqué que le compte rendu financier du club des géologues amateurs.

Toute la vie locale est attendue dans les pages de votre quotidien. Cela va des conflits sociaux -et leurs dénouements- aux fêtes en passant par les arrivées et départs d'enseignants, de fonctionnaires, la fermeture ou l'ouverture de structures, les succès universitaires surtout s'ils concernent des enfants de personnes connues et appréciées, la politique et tout ce que l'on appelait jadis "les chiens écrasés".

Il faut bien reconnaître que chacun se focalise sur le, ou les, thème(s) qui l'intéresse(nt). Le supporter du rugby se passionne rarement pour la philatélie, les parents d'élèves se sentent plus concernés par la vie scolaire que les résidents de la maison de retraite. Le plus difficile c'est de trouver l'équilibre le plus adéquat.

Il faut aussi penser que si un évènement majeur intervient il prend le pas sur le reste. Ceci est valable pour tous les médias. Quand un grand de ce monde disparaît ne vous attendez pas à voir les chaînes de T.V s'attarder sur un handicapé qui vient de réaliser un exploit sportif. Au niveau local si un correspondant veut présenter le dysfonctionnement d'une écluse qui perturbe la vie d'une rivière il vaut mieux qu'il cherche, pour aborder le sujet, un relâchement, difficile à prévoir, de l'activité locale.

 

 

Pierre Fabre. 

 

 

 

 





25/09/2012
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